L’intégration de collaborateurs neuroatypiques, un enjeu de formation
Gestion des compétences – diversité – 14/02/2023
Ces dernières années, l’inclusion s’impose comme un sujet majeur pour les professionnels RH, qui s’ouvrent aujourd’hui à la diversité cognitive. Pour les responsables formation, le défi est à la fois de sensibiliser l’interne sur les spécificités des profils neuroatypiques, et d’accompagner les managers et les collègues dans leur onboarding au sein des équipes.
En 2021, plusieurs entreprises de premier plan ont initié des programmes dédiés à la diversité cognitive. C’est par exemple le cas du Groupe Orange avec Neuroteam, un dispositif ambitieux visant notamment l’accompagnement de la ligne managériale, avec une forte dimension d’information et de pédagogie. Autre exemple : le réseau Douances et Zébritudes de SNCF, qui se donne comme objectif de fournir des éléments de compréhension sur la richesse que peuvent représenter les profils neuroatypiques – 15 à 20 % de la population.
Ce terme recoupe en fait une grande palette de situations : HPI (haut potentiel intellectuel), autisme et syndrome d’Asperger, troubles dys (dyslexie, dysorthographie, dysphasie, dyspraxie), troubles attentionnels avec ou sans hyperactivité, hypersensibilité… Du faut du fonctionnement spécifique de leur cerveau et de leurs modes de pensée, les collaborateurs concernés peuvent avoir besoin d’aménagement – de l’environnement comme de l’organisation de travail – pour exprimer tout leur potentiel. Pour une équipe, la présence d’un ou plusieurs profils neuroatypiques peut représenter une véritable opportunité de performance, économique et sociale.
Focus sur le fonctionnement cognitif des autistes Asperger
Un exemple emblématique est celui des personnes autistes de type Asperger. Un chercheur s’est récemment intéressé à leur niveau d’implication organisationnelle. Les entretiens réalisés auprès de ces salariés ont notamment mis en en évidence une volonté manifeste de « bien faire ». Plusieurs qualités les caractérisent – des qualités particulièrement recherchées par les employeurs : efficacité, précision, constance, et faible taux d’absentéisme.
A contrario, certaines attitudes peuvent sembler « jusqu’au-boutistes ». Comme l’explique le chercheur, « le salarié autiste Asperger semble concrètement nourrir un besoin d’apporter quelque chose à son organisation, ses collègues, son client. Il aura du mal avec les retards et pourra être vu comme un acharné ou un accro au travail. Il fera toujours le maximum pour que les choses avancent, quitte à passer parfois trois ou quatre nuits blanches sur sa mission. » Un zèle apparent qui pourrait être tout autant plébiscité par le manager que mal perçu par les collègues.
Une démarche globale, entre sensibilisation et accompagnement personnalisé
Cet exemple illustre l’importance d’un management adapté aux salariés relevant de la diversité cognitive. La première étape consiste à sensibiliser l’interne, dans une logique de communication 360°, indispensable pour contribuer à une culture réellement inclusive. Il s’agit également de mobiliser plusieurs parties prenantes internes – RH, managers, santé au travail – pour mettre en place plusieurs process ; par exemple, le parcours d’intégration, avec l’attribution d’un référent au sein de l’équipe, chargé d’accompagner son collègue dans la découverte de l’équipe et de ses missions ; ou encore, l’adaptation des rythmes de travail.
Un autre axe de travail consiste à former les managers à la gestion de profils neuroatypiques, voire de les coacher en amont et pendant l’onboarding d’une nouvelle recrue. Plus largement, cet accompagnement a intérêt à s’adresser à l’ensemble de l’équipe. Le service formation peut notamment partir de dispositifs déjà mis en place pour favoriser d’autres formes de diversité (culturelle, égalité femmes-hommes, etc.) pour les transposer : par exemple, groupes de réflexion et de co-développement, prévention des biais cognitifs, etc.
L’accompagnement à l’inclusion ne serait pas complet sans s’adresser aussi aux collaborateurs neuroatypiques eux-mêmes. Certains d’entre eux peuvent avoir des difficultés à assimiler les codes de l’entreprise ou à intégrer les exigences du travail en équipe. Un besoin de formation sur-mesure peut alors se faire ressentir.
C’est donc en direction de l’ensemble de l’organisation, à des degrés variables et avec des réponses différenciées, que le responsable formation doit intervenir pour favoriser, à son niveau, la diversité cognitive.
Jérôme Lesage
Le blog de la formation
Qu’entend-on par diversité cognitive ?
Il s’agit d’un terme englobant l’ensemble des profils dits « neuroatypiques », manifestant un fonctionnement cérébral et cognitif spécifique : HPI (haut potentiel intellectuel), autisme et syndrome d’Asperger, troubles dys, troubles attentionnels avec ou sans hyperactivité, hypersensibilité… Soit environ un adulte sur cinq.
En quoi ce sujet s’invite aujourd’hui dans le monde de l’entreprise ?
Ces dernières années, plusieurs entreprises pionnières ont commencé à s’intéresser aux conditions d’accueil des profils neuroatypiques au sein des équipes. Des programmes spécifiques sont déployés, mettant l’accent sur la sensibilisation et le développement de la culture inclusive, favorable à l’expression de la diversité cognitive et des compétences associées.
De quelle manière le service formation peut-il contribuer à cette dynamique ?
D’abord, en formant les managers à l’encadrement de collaborateurs neuroatypiques, voire par du coaching pour soutenir l’intégration d’une nouvelle recrue. Les collègues eux-mêmes peuvent être en attente de formation. Ensuite, en accompagnant les collaborateurs neuroatypiques si le besoin se fait sentir, par exemple pour comprendre les contraintes du travail en équipe.