Prévenir la cyberdépendance, un nouvel axe de formation
Gestion des compétences — Soft skills – 08/11/2022
L’addiction aux écrans et à internet concernerait plus d’un Français sur quatre, avec des conséquences négatives sur la vie personnelle comme professionnelle. Alors que la préservation de la santé mentale des salariés s’impose parmi les défis RH incontournables, les responsables formation ont sans doute une carte à jouer dans la lutte contre la cyberdépendance.
Smartphones, ordinateurs, tablettes, consoles de jeu vidéo… L’omniprésence des écrans et les activités en ligne touchent aujourd’hui toutes les générations et tous les milieux, avec leur lot de comportements problématiques et de difficultés à « décrocher ». Les usages ne font pas toujours l’objet d’un auto-contrôle suffisant, ouvrant la voie à une nouvelle forme d’addiction.
Un phénomène de dépendance qui serait déjà très répandu, comme le révèle une étude menée par le cabinet G.A.E Conseil, spécialisé dans la prévention des conduites addictives en milieu professionnel. D’après cette enquête réalisée auprès d’un échantillon représentatif, 28 % des Français, soit 14,5 millions d’adultes, présenteraient une pratique à risque de cyberdépendance, qu’il s’agisse de l’utilisation des smartphones et des réseaux sociaux, du binge watching de séries sur internet, ou encore des jeux de hasard et d’argent en ligne. « Au-delà de l’effet levier lié au développement des technologies, et de l’impact générationnel, les chiffres de l’étude montrent une situation alarmante du point de vue des addictions aux écrans et dont semble-t-il les Français n’ont que très peu conscience », analyse Alexis Peschard, addictologue et président fondateur du cabinet G.A.E Conseil.
Concentration, motivation et efficacité, altérées par la cyberdépendance
Or cette suractivité numérique peut entraîner des conséquences négatives sur la vie personnelle ; c’est le cas pour quatre Français sur dix, dont le comportement est source de problèmes variés. Les impacts concernent notamment le sommeil et l’état de forme, la motivation à la pratique sportive, les activités culturelles et de loisir, mais aussi le budget. Même si la cyberdépendance s’exprime avant tout dans la sphère privée, des problèmes peuvent aussi se poser au travail, en particulier pour les 25-34 ans (41 %) et les cadres (30 %). Les effets négatifs se manifestent principalement sur la concentration, le niveau de vigilance, l’efficacité professionnelle, la motivation et même sur les relations avec les collègues.
Alors que la préservation de la santé mentale des collaborateurs devient un enjeu RH majeur, et que la cyberdépendance altère la performance au travail, la problématique a tout intérêt à s’inviter dans les chantiers de la direction des ressources humaines, et du service formation en particulier. Différentes possibilités sont à explorer, notamment des ressources spécifiques déployées dans l’entreprise, à son initiative ou à celle des branches professionnelles. Il s’agit de programmes d’aide aux employés (PAE) qui prennent la forme d’une assistance psychologique, ou de PAE spécialisés en addictologie. Ces services sont gratuits et strictement confidentiels.
De la sensibilisation aux parcours de formation, en passant par des tests d’évaluation
Pour aller plus loin, le service formation peut concevoir et déployer des programmes de sensibilisation au risque de dépendance, enrichis de conseils pratiques pour déconnecter et/ou réguler son rapport aux écrans – et limiter le risque d’émergence de la problématique et des symptômes associés. Mais sensibiliser n’étant pas toujours suffisant, il faut également permettre aux collaborateurs de mesurer leur degré de cyberdépendance, avec l’appui de tests standardisés, comme l’Internet Addiction Test (IAT) ou encore l’échelle SAS-SV, dédiée à l’usage excessif du smartphone.
Une première étape de diagnostic qui doit déboucher sur des opportunités d’accès à des formations centrées sur le risque de cyberdépendance, créées et animées avec le soutien de cabinets spécialisés dans la prévention des conduites addictives au travail. Ces parcours, qui visent une forme de désaccoutumance préventive ou corrective, ont tout intérêt à être organisés en présentiel, un format propice aux partages d’expérience et à la prise en compte des vécus individuels, sans la médiation d’un écran.
Pour les responsables formation, la lutte contre la cyberdépendance représente ainsi une réponse concrète à plusieurs enjeux : d’abord, un enjeu d’expérience collaborateur, centré sur la préservation de la santé mentale et la contribution au bien-être individuel ; ensuite, un enjeu de performance sociale mais aussi économique, dans lequel chaque salarié peut donner le meilleur de lui-même et maintenir un haut niveau de productivité.
Jérôme Lesage
Le blog de la formation
Pour aller plus loin : A. Peschard, Tous accros aux écrans. Cyberdépendances : que faire et comment en sortir ?, Mardaga, 2022
En quoi la prévention de la cyberdépendance devient-elle un sujet d’entreprise ?
Plus d’un Français sur quatre serait aujourd’hui en situation d’addiction aux écrans, avec des impacts négatifs dans la vie professionnelle – manque de concentration, vigilance affectée, moindre motivation, baisse d’efficacité…
Pourquoi la DRH doit-elle être en première ligne ?
Lutter contre la cyberdépendance revêt plusieurs objectifs : contribuer à la préservation de la santé mentale des salariés, améliorer l’expérience collaborateur, mais aussi favoriser la performance sociale et économique de l’organisation.
Comment le service formation peut-il s’impliquer dans cette dynamique ?
Plusieurs options se présentent au responsable formation : proposer des programmes d’aide aux employés (PAE), gratuits et confidentiels ; mettre en place des actions de sensibilisation ; proposer des tests d’évaluation de la cyberdépendance ; et déployer des formations dédiées, avec le concours de cabinets spécialisés dans la prévention des conduites addictives.